Sortir de l’Union européenne, n’est-ce pas en faire un peu trop ?

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Le texte qui suit est une réponse de François ASSELINEAU à un internaute, critique contre la construction européenne, mais qui se demandait néanmoins si “sortir de l’Union européenne n’est pas un peu trop“.

Cher Monsieur,

Je vous remercie vivement de l’intérêt que vous portez à l’UPR.

Vous faites partie de ces très nombreux Français, réfléchis et de bonne foi, qui ont maintenant bien compris que la “construction européenne” est en train de détruire la France, son économie, ses acquis sociaux, son mode de vie, sa langue, son identité, sa place dans le monde, etc., mais qui, pour autant, ont encore des réticences à en tirer la seule conséquence qui s’impose, à savoir qu’il faut sortir de cette servitude volontaire en quittant purement et simplement la prétendue “Union européenne”.

Je ne vous reproche rien, bien entendu, et il est parfaitement normal que vous ayez des réticences, comme nous en avons tous eues.
Mais je dresse un constat, tiré de ma propre expérience : cette réticence que vous avez à admettre qu’il n’y a pas d’autre solution que de sortir de l’UE vient probablement du fait que, comme une très grande majorité de Français, vous n’entendez toujours que les seuls arguments de la propagande européiste ou “alter-européiste”. Et en particulier cette propagande, incessante et très maligne, qui invite les critiques à faire preuve encore et encore de patience, en leur faisant miroiter l’idée qu’une “autre Europe” serait possible, et en les invitant à cogiter dessus.

Pourtant, réfléchissez : lors des élections européennes de 1979, le slogan du PS était “Changer d’Europe” ; et lors des élections européennes de 2009, le slogan du PS était “Changeons l’Europe”.

En 30 ans, non seulement l’Europe n’a pas le moins du monde changé dans le sens promis par le PS à ses troupes en 1979, mais son alignement tous azimuts sur les intérêts américains et ultra-libéraux n’a fait que s’affirmer, jusqu’à ce qu’il crève désormais les yeux de nos concitoyens.

La bonne question que vous devez donc vous poser n’est pas “quelle serait l’Europe idéale ?” mais : “Pourquoi TOUS les projets d’autre Europe, venus de droite, du centre, de gauche, ou des extrêmes, n’ont-ils jamais vu le moindre début de commencement depuis 30 ans ?”

Si vous voulez obtenir des explications claires et irréfutables à cet état de fait, je me permets de vous suggérer de visionner mes conférences en ligne. En particulier celle intitulée “Qui gouverne la France ?” – déjà en ligne – et plus encore celle sur “Qui gouverne la France et l’Europe ?” qui le sera prochainement. Je vous invite aussi à venir, si cela vous est possible, à la réunion publique que je tiendrai samedi 1er octobre à Paris.

La raison essentielle pour laquelle une “autre Europe” est impossible, c’est que la “construction” européenne ligote ensemble un nombre sans cesse croissant d’États aux intérêts nationaux divergents, voire opposés, dans tous les domaines. La seule résultante possible d’une telle structure, c’est une situation de blocage continuel que seul peut piloter à sa guise le “fédérateur extérieur” que Charles de Gaulle avait dénoncé dès sa conférence de presse du 15 mai 1962 : les États-Unis d’Amérique.

Pourquoi cela ? Parce qu’une très grande majorité des États membres de l’Union européenne sont alignés politiquement, économiquement et mentalement sur les États-Unis d’Amérique.

Là encore, réfléchissez à ces deux exemples :

a) Avec 27 États, 23 langues officielles et 506 combinaisons de traduction, l’UE est devenue une Tour de Babel ingérable. Pour qu’elle puisse fonctionner un minimum, il faut qu’elle adopte de facto une langue unique de travail. Et quelle est cette langue ? l’anglo-américain bien sûr. Désormais, plus de 90% des documents de travail de la Commission se font en anglo-américain, alors que le français faisait encore à peu près jeu égal dans les années 80. Ainsi se referme le piège, de façon implacable, car l’utilisation d’une langue est chose capitale : une langue véhicule une vision du monde, des valeurs, une identité. Une langue COLONISE.

b) Que cela plaise ou pas, c’est une situation indéniable que la grande majorité des États membres de l’UE à 27 est totalement alignée sur les États-Unis. C’est le cas :

  • du Royaume-Uni bien sûr,
  • mais aussi de l’Allemagne qui, contrairement aux sornettes que l’on raconte aux Français, ne souhaite aucunement que l’Europe prenne ses distances d’avec les USA. Le prétendu “moteur franco-allemand” que l’on ressasse aux Français n’est à peu près jamais évoqué outre-Rhin et n’a d’ailleurs jamais existé, depuis que le Bundestag a ratifié, en juin 1963, le fameux traité de l’Élysée de janvier 1963 en le vidant de sa substance “gaullienne” pour en faire un instrument d’alignement total sur la stratégie américaine. L’Allemagne a continuellement fait le choix d’une alliance avec Washington depuis 1945, et elle a réaffirmé ce choix stratégique essentiel en signant – en 2003 – une très officielle “Alliance stratégique germano-américaine pour le XXIe siècle”,
  • du Portugal et de sa base américaine des Açores,
  • de l’Irlande dont l’économie a très largement bénéficié des investissements américains,
  • des pays du Bénélux, traditionnellement pro-américains et ultra-libre échangistes comme la Grande Bretagne,
  • de TOUS les pays de l’est, qui sont d’abord entrés dans l’OTAN avant d’entrer dans l’UE en 2005, et qui ont recherché dans cette double adhésion d’abord et avant tout le parapluie stratégique américain pour les protéger de la Russie.

Dans ces conditions, avec quels États, quels gouvernants, quels peuples, ceux qui, en France, souhaitent bâtir une « autre Europe » qui correspondrait aux desiderata des Français, vont-ils le faire ? Question sans réponse qu’éludent systématiquement les partis qui proposent une “Autre Europe”.

C’est parce qu’il n’y a personne en face pour répondre à ce souhait des Français que l’Autre Europe est un mythe.
Et si ce mythe est diffusé à satiété dans nos médias, pourtant entièrement verrouillés par les intérêts euro-atlantistes, c’est bien que ces intérêts y trouvent leur compte.
Le mythe de l’Autre Europe sert à endormir nos concitoyens et à tuer dans l’œuf tout début de prise de conscience et tout embryon de remise en cause réelle du processus d’asservissement en cours.

Nos compatriotes de bonne foi, qui n’osent pas aller jusqu’au bout de la logique et qui imaginent encore, comme leurs parents l’ont fait depuis cinq décennies, pourvoir bâtir une « autre Europe », doivent donc bien mesurer la conséquence très concrète de leur attentisme :

  • chaque jour ouvrable, la France PERD ENVIRON 800 À 1000 EMPLOIS INDUSTRIELS,
  • chaque jour, la France verse à fonds perdus et sans retour 20 millions d’euros à l’Union européenne,
  • chaque jour, des nouvelles remises en cause de nos acquis sociaux et de nouvelles contraintes liberticides nous proviennent de Bruxelles comme autant d’oukases piétinant l’essence même de notre République et de notre démocratie,
  • chaque jour, des soldats français, engagés dans une coalition euro-atlantiste, meurent en Afghanistan ou y participent à des crimes de guerre, que les médias qualifient de “bavures”,
  • chaque jour, la France perd de l’influence et de la sympathie dans le monde,
  • chaque jour, la langue française et le rayonnement intellectuel et moral de la patrie de Voltaire, Jaurès et Charles de Gaulle, s’affaiblit un peu plus.

Il y a donc une TRÈS, TRÈS GRANDE URGENCE à sortir de cette « prison des peuples » qu’est la construction européenne.

ATTENDRE ENCORE, C’EST FAIRE LE CHOIX DE SOUTENIR NOTRE AUTO-DESTRUCTION.

Car comme le dit le proverbe chinois que j’aime à citer dans l’une de mes conférences : « C’est dormir toute sa vie que de croire à ses rêves ».

Cordialement,
François ASSELINEAU