À propos de la “moralisation de la vie politique” l’exemple Allemand

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L’ancien président de la République fédérale d’Allemagne, M. Christian Wulff, vient d’être inculpé pour corruption par le parquet de Hanovre ce vendredi 12 avril 2013.

Outre-Rhin, le poste de président de la République est essentiellement honorifique et symbolique, mais les Allemands ne plaisantent pas avec le devoir de moralité de son détenteur.

M. Wulff avait été contraint à la démission en février 2012 parce qu’il était soupçonné de s’être fait payer, avec son épouse [cf. photo]…. un simple séjour dans un hôtel par un producteur de cinéma, en contrepartie de son soutien à un projet de film.

Un simple séjour en couple offert ? Cela paraît péché bien véniel aux yeux des Français, mais pas aux yeux des Allemands. Et c’est cette affaire qui rebondit aujourd’hui : le parquet a précisé que Davod Groenwold, le producteur en question, est lui-aussi inculpé. Si la procédure continue comme prévu, c’est la toute première fois qu’un ancien chef de l’État allemand devra se présenter pour la première fois devant un tribunal.

Wulff-Hollande

ET FRANÇOIS HOLLANDE ? DÉTOURNEMENT DE FONDS PUBLICS OU FRAUDE FISCALE À L’ISF ?

Cette information tombe mal pour François Hollande.

Car, au moment où le président de la République ne cesse de nous donner l’Allemagne en exemple économique et social, et de promettre une « République exemplaire » en France, la rumeur enfle sur le très mauvais pas dans lequel il s’est placé, avec le financement sur fonds publics des activités de Mme Valérie Trierweiler à l’Élysée.

Car il s’est placé de lui-même dans un sérieux dilemme.

Un risque de poursuite pour détournement de fonds publics…

Le problème tient au fait que Mme Trierweiler, n’étant ni sa femme ni sa partenaire de PACS, l’actuel locataire de l’Élysée n’a pas de lien juridique avec elle, mais des liens affectifs notoires, qui sont à l’origine de sa présence à l’Élysée.

Des juristes font remarquer que cela pourrait être passible des articles 432-15 et 432-16 du Code Pénal, qui frappent de 1 à 10 ans de prison et de 15.000 à 150.000 euros d’amende tout « détournement de fonds publics » par « une personne dépositaire de l’autorité publique » (selon qu’il s’agit d’un acte délibéré ou d’une négligence) :

Article 432-15 du Code Pénal

Le fait, par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, un comptable public, un dépositaire public ou l’un de ses subordonnés, de détruire, détourner ou soustraire un acte ou un titre, ou des fonds publics ou privés, […] est puni de dix ans d’emprisonnement et de 150.000 euros d’amende… La tentative de délit, prévu à l’alinéa qui précède, est punie des mêmes peines.
[ source : Legifrance]

Article 432-16 du Code Pénal

Lorsque la destruction, le détournement ou la soustraction par un tiers des biens visés à l’article 432-15 résulte de la négligence d’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, d’un comptable public ou d’un dépositaire public, celle-ci est punie d’un an d’emprisonnement et de 15000 euros d’amende.”
[source : Legifrance]

Mais d’autres juristes, en revanche, volent au secours de François Hollande en faisant remarquer que l’article 515-8 du Code civil reconnaît la notion juridique de “concubinage” :

Article 515-8 du Code Civil

Le concubinage est une union de fait, caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes, de sexe différent ou de même sexe, qui vivent en couple.
[ source : Legifrance]

Dès lors que le concubinage est reconnu juridiquement par la République française, le statut de Mme Valérie Trierweiler lui donnerait donc une sorte de droit de représentativité de son époux, qui justifierait les dépenses publiques y consacrées.

… ou sinon un risque de poursuite pour fraude fiscale à l’ISF

Seulement voilà : si l’on retient cette deuxième hypothèse, donc si l’on reconnaît à Mme Valérie Trierweiler le statut de “concubine notoire” du chef de l’État, il surgit alors un nouveau et redoutable problème, qui est celui de leur déclaration fiscale en matière d’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF).

Car l’ISF présente cette particularité d’assimiler le concubinage à un foyer fiscal.

Dans la mesure où leur concubinage serait reconnu comme “notoire” pour échapper à l’incrimination de détournement de fonds publics, Valérie Trierweiler et François Hollande sont alors en infraction fiscale : cela fait belle lurette qu’ils auraient dû faire masse unique de leur patrimoine respectif ainsi que de ceux des enfants mineurs dont ils ont l’administration légale. (Cela n’interfère pas avec le fait qu’ils soient imposés séparément sur le revenu).

Or, compte tenu de ce que l’on sait du patrimoine de l’un et de l’autre, il est très vraisemblable que le couple de concubins est assujetti à l’ISF et ne l’a pas déclaré. Étant entendu qu’en cas de fausse déclaration, la loi prévoit, entre autres sanctions, la privation des droits civiques…

Pour ceux qui souhaitent des détails sur le patrimoine de Mme Trierweiler et de M. Hollande, et de plus amples commentaires sur la situation inextricable ainsi créée, il faut lire cet article.

CONCLUSION : COMME DIRAIT FRANÇOIS HOLLANDE, IL YA URGENCE À AVOIR UNE « RÉPUBLIQUE EXEMPLAIRE » ET UNE « MORALISATION DE LA VIE POLITIQUE »….

Au moment où la France sombre dans une crise économique, sociale, politique et morale de toute première ampleur, et où l’affaire Cahuzac a amené le président de la République à annoncer qu’il sera « intraitable » pour « moraliser la vie politique française » et « lutter contre la fraude fiscale », toute cette affaire est évidemment du plus mauvais effet car elle ridiculise son propos.

Si j’avais un conseil à donner au locataire de l’Élysée, c’est de régulariser cette embrouille au plus vite, avant qu’elle ne dégénère.