Brexit : David Cameron interdit aux fonctionnaires de préparer des dossiers pour les députés pro-Brexit

Lecture : 6 min

Spécial Brexit n°2 == la décision de David Cameron d’interdire aux fonctionnaires de préparer des discours ou des dossiers à ses députés pro-Brexit provoque un scandale outre-manche.

Nous poursuivons la série d’articles sur le prochain référendum britannique sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (qualifié par la presse de “Brexit”).

Dans ce cadre, nous publions régulièrement des articles tirés de la presse d’Outre-Manche. Ces articles sont sélectionnés par nos militants, puis traduits en français avec l’aide de notre service de traduction et revus par notre service de correction.

Le premier article – extrêmement intéressant – que nous avons publié avait été rédigé par Nigel Lawson, Ancien Chancelier de l’Échiquier, et publié dans l’un des plus grands journaux britanniques, le Daily Telegraph.
Le lecteur pourra le relire ici : http://www.upr.fr/actualite/nigel-lawson-brexit-margaret-thatcher

Nous publions ci-dessous un article publié le 24 février dans le plus prestigieux journal britannique – The Times -.

Le journaliste Jill Sherman y révèle que David Cameron – via Sir Jeremy Heywood, le secrétaire du cabinet – a donné instruction pour que les fonctionnaires britanniques puissent fournir toutes les informations (dossiers, projets de discours, etc.) aux députés favorables au maintien dans l’UE, mais qu’ils leur soient interdits de transmettre quoi que ce soit ayant trait à l’UE à ses députés favorables à la sortie.

Le Times de Londres précise que cette décision fait scandale. “La colère gronde parmi les parlementaires pro-sortie, qui se voient refuser l’accès aux documents officiels” et qui s’indignent de ce nouveau déni de démocratie et de cette “dissimulation”.

Je rappelle ici ce qu’avait dit de façon magistrale John Morley, homme politique britannique libéral du XIXe siècle : «You have not converted a man because you have silenced him. » : « Vous n’avez pas convaincu un homme parce que vous l’avez réduit au silence. »

François Asselineau

 

brexit-cameron

Scandale alors que les députés en faveur de la sortie sont prives d’accès aux documents officiels

Jill Sherman, 24.02.2016, The Times

La colère gronde parmi les parlementaires pro-sortie, qui se voient refuser l’accès aux documents officiels.

Les eurosceptiques ont dénoncé comme « une insulte à la démocratie » la décision d’interdire l’accès aux rapports et documents officiels aux députés qui font campagne pour la sortie de l’Union européenne.

Sir Jeremy Heywood, le secrétaire du cabinet, a en effet édicté des règles strictes qui interdisent aux fonctionnaires de préparer des discours pour les députés pro-Brexit ou de donner à ceux-ci accès aux documents en relation avec le référendum.

Les fonctionnaires seront en mesure d’offrir leur aide aux députés qui soutiennent la volonté du gouvernement à rester dans l’UE.

Les consignes, qui ont circulé hier dans une lettre aux secrétaires permanents, font que Michael Gove, Iain Duncan Smith et les quatre autres rebelles du cabinet seront considérablement désavantagés dans la défense de leur cause.

L’eurodéputé Nathan Gill, de l’Ukip, a accusé le gouvernement de commettre une dissimulation épouvantable. « Une stratégie de sortie doit absolument être élaborée auparavant, à moins qu’il ne soit prévu que les résultats soient truqués, a-t-il déclaré. Priver le public de l’information nécessaire à une prise de décision éclairée sur une question aussi importante est la plus grande des insultes faites à la démocratie. »

« Les gens ont besoin de savoir à quoi un après-UE ressemblerait, et les fonctionnaires ne livrent pas cette information, a-t-il ajouté. C’est un vrai coup monté. »

Selon Matthew Elliott, responsable de la campagne Vote Leave [« Votez pour le départ »], la fonction publique est constitutivement pro-UE. « Ce n’est donc pas surprenant qu’ils fassent tout pour compliquer la tâche des députés qui militent pour la sortie, a-t-il déclaré. Les fonctionnaires utilisent souvent la législation européenne comme un moyen de contrecarrer les décisions intelligentes des députés. »

Il sera aussi interdit aux conseillers spéciaux des députés partisans de la sortie d’avoir accès aux informations à propos du référendum ou d’aider leurs supérieurs à préparer des discours sur la question.

« Il ne serait pas convenable ni légitime que le service public apporte son concours à des députés en désaccord avec la position officielle du gouvernement en leur fournissant des éléments de rapports ou de discours, a écrit sir Jeremy. Cela inclut l’accès aux documents officiels des ministères, à l’exception des documents portant sur des sujets relatifs au référendum que les députés ont vus avant la suspension de l’accord collectif. »

David Cameron a mis en suspens la « responsabilité collective » [convention qui impose aux membres du cabinet de soutenir la position du gouvernement] pour permettre aux députés de faire campagne contre la position du gouvernement.
Interrogée sur les conséquences d’une violation de ces consignes, la porte-parole du Premier ministre a répondu : « Inutile de répondre à une question qui ne s’est pas encore posée. »

Sir Jeremy a aussi déclaré que les fonctionnaires avaient toujours accès aux données essentielles pour les députés pro-sortie et seraient en mesure de les aider sur des sujets non référendaires, y compris d’autres sujets relatifs à l’UE.

Il est interdit à tout fonctionnaire de s’exprimer lors d’événements publics, mais la note précise bien qu’ils peuvent participer à la rédaction de discours et fournir des rapports aux députés qui sont en faveur du maintien. Cela inclut les événements organisés par des groupes « militant dans le même camp que le gouvernement ».

« Les groupes de campagne désignés ne pourront organiser ni visite ni événement dans l’enceinte des bâtiments gouvernementaux » a indiqué sir Jeremy, et, lorsque les actions du gouvernement se combineront avec la campagne, le groupe devra participer aux frais.

La lettre précise aussi que si un conseiller spécial souhaite travailler à temps plein pour une équipe de campagne il doit suspendre ses activités pour la durée de la campagne.

« Tout conseiller spécial souhaitant travailler à mi-temps ou à temps plein pour une équipe de campagne verra son salaire réduit en proportion, est-il écrit. Les conseillers qui le souhaitent peuvent apporter leur concours aux députés qui font campagne contre les positions du gouvernement, selon leur désir, à condition de le faire sur leur temps libre, en dehors des horaires de travail, et sans puiser dans les ressources publiques ou ministérielles. »

Ce rapport de cinq pages prévient également les fonctionnaires que, avant le referendum, les publications officielles seront « scrutées d’encore plus près qu’à l’habitude » et qu’une attention toute particulière sera portée à leur exactitude.

source : The Times –
http://www.thetimes.co.uk/…/news/politics/article4697891.ece

date: 24 février 2016

auteur : Jill Sherman