Nouveau record historique de chômage en zone euro : 12,1% en mars 2013

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Selon les chiffres officiels (et donc manipulés à la baisse) publiés ce mardi 30 avril 2013 par l’institut européen de statistiques Eurostat, le chômage a encore bondi dans toute la zone euro, pour atteindre un nouveau record absolu de 19,2 millions de personnes, soit 12,1% de la population active de la zone.

Le chômage, qui vole de record en record en Europe, en est à son 23e mois consécutif de hausse dans la zone euro, où 62 000 personnes supplémentaires sont venues grossir les rangs des demandeurs d’emploi en un mois.

Dans l’ensemble de l’Union européenne, le chômage a frappé 26,5 millions de personnes, soit un taux de 10,9% et 69 000 demandeurs d’emploi supplémentaires par rapport à février.

UNE PROGRESSION SPECTACULAIRE ET IRRÉSISTIBLE DANS TOUTE LA ZONE EURO

L’aggravation du chômage est aussi spectaculaire qu’irrésistible partout en Europe, mais de façon nettement plus marquée dans la zone euro. En un an (de mars 2012 à mars 2013), le taux de chômage est en effet passé de 11,0% à 12,1% dans la zone euro (soit +1,1 point), mais de 10,3% à 10,9% dans l’ensemble de l’UE (soit +0,6 point).

C’est toujours en Grèce que le taux est le plus élevé, et là encore il ne cesse d’augmenter : il s’établit à 27,2%, selon les dernières données disponibles datant de janvier, contre 26,4% en décembre.

Le taux espagnol monte également, et se rapproche dangereusement de celui de la Grèce: il était de 26,7% en mars, contre 26,3% le mois précédent.

En France, le taux de chômage officiel est monté à 11,0 % contre 10,8% un mois plus tôt, tandis qu’il est resté stable en Allemagne à 5,4%.

Le taux de chômage des jeunes s’est élevé à 24% dans la zone euro en mars. Il atteignait 59,1% en Grèce (selon des données datant de janvier) et 55,9% en Espagne, mais aussi 38,4% en Italie et 38,3% au Portugal.

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LA PRÉSENTATION ARTIFICIEUSE D’EUROSTAT CACHE L’ESSENTIEL

Comme à l’accoutumée, Eurostat publie les statistiques du chômage :

  • dans la zone euro d’une part (dénommée “ZE17” par Eurostat),
  • et dans l’UE à 27 d’autre part (dénommée “UE27” par Eurostat),
  • mais se refuse à publier les statistiques du chômage dans les 10 États de l’UE qui ne sont pas dans l’euro (ce que j’appelle “ZHE 10” pour reprendre le type de terminologie d’Eurostat)

J’ai déjà dénoncé, en janvier dernier, cette supercherie de présentation, qui empêche les lecteurs, et notamment les journalistes, de disposer d’une comparaison immédiate entre la situation économique et sociale entre les États de l’UE ayant adopté l’euro et ceux qui ont conservé leur monnaie nationale. (Je renvoie à mon analyse détaillée).

Compte tenu de la situation et des polémiques qui font rage sur les bienfaits et les méfaits de la monnaie commune européenne, ce serait en effet la moindre des choses que de publier conjointement les résultats agrégés de la zone euro et de la zone hors euro.

Pour comprendre cette supercherie, il suffit par exemple de décrypter ce qui se cache derrière cette formulation du dernier communiqué d’Eurostat de ce 30 avril 2013 : « En mars 2013, 5,690 millions de jeunes de moins de 25 ans étaient au chômage dans l’UE27, dont 3,599 millions dans la zone euro. Par rapport à mars 2012, le nombre de jeunes chômeurs a augmenté de 177 000 dans l’UE27 et de 184 000 dans la zone euro.»

Si l’on y réfléchit un instant, cette présentation artificieuse signifie que le nombre de jeunes chômeurs a augmenté de 184 000 dans la zone euro et qu’il a… baissé de 7 000 dans les 10 États de l’UE hors zone euro.

De la même façon, si le taux de chômage est passé, au cours des 12 derniers mois, de 11,0% à 12,1% dans la zone euro mais seulement de 10,3% à 10,9% dans l’ensemble de l’UE, cela signifie

  • d’une part que la moyenne des taux de chômage est sensiblement inférieure dans les 10 États de l’UE hors zone euro par rapport à ce qu’elle est dans les 17 États de l’UE qui sont entrés dans l’euro
  • d’autre part, et nécessairement, que le taux de chômage a baissé dans les 10 États de l’UE hors zone euro.

CONCLUSION : L’ÉCRASANTE RESPONSABILITÉ DE L’EURO

Cette dernière remarque trouve sa visualisation graphique dans la comparaison des courbes des taux de chômage de janvier 2000 à mars 2013 ci-dessous :

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Dans ce graphique :
– l’évolution sur les 12 dernières années du taux de chômage dans la zone euro est retracée en bleu ;
– l’évolution sur les 12 dernières années du taux de chômage dans l’UE 27 est retracée en noir ;
– le différentiel entre les deux courbes permet de visualiser la situation du chômage, cachée par Eurostat, dans les  les 10 États de l’UE hors zone euro.

Comme on le voit :

  • ce différentiel jouait en faveur de la zone euro dans ses débuts : le taux de chômage de la zone euro était inférieur à celui des États de l’UE hors zone euro, je l’ai représenté par une flèche verte. Ce différentiel a atteint un sommet en faveur de la zone euro à la mi-2001. On notera que c’était au moment où l’euro s’était considérablement déprécié sur les marchés des changes, et qu’il ne valait plus que 0,85 dollar.
  • le différentiel s’est peu à peu réduit, puis il a commencé à s’inverser à partir de 2003, là encore corrélativement à la hausse de la valeur de l’euro par rapport au dollar. J’ai fait ressortir cette inversion par un changement de couleur : la flèche est désormais rouge.
  • à partir de 2005, le différentiel des taux de chômage n’a fait que s’accroître, de façon continuelle, en défaveur de la zone euro. La flambée du chômage dans la zone euro depuis 2011 n’est plus due principalement à la surévaluation de l’euro sur les marchés de changes, mais aux politiques délibérément récessives engagées par tous les pays de la zone euro, sur injonction de la BCE, de l’UE et du FMI, afin de “sauver l’euro”.

En d’autres termes, l’examen précis et objectif des résultats économiques sur les 12 dernières années prouve que la responsabilité de l’euro dans la flambée du chômage et dans l’appauvrissement général du continent européen n’est pas une hypothèse mais une certitude.

La responsabilité des dirigeants européistes qui refusent de le reconnaître et d’en tirer les conséquences est écrasante et elle finira, tôt ou tard, par se payer politiquement.

François ASSELINEAU