Futur CHU de Guadeloupe : l’analyse de l’UPR sème l’émoi en Guadeloupe

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En réaction à notre récent article sur la construction du futur CHU de Guadeloupe, une certaine gêne monte incontestablement au sein de la classe politique locale, dont beaucoup ont dû tomber de leurs chaises. A croire que l’UPR a occupé les esprits, et même les conversations, de certains durant ce réveillon…

À commencer par Monsieur Victorin Lurel.

Victorin Lurel n’est pas n’importe qui en Guadeloupe, puisqu’il a été maire, président de région, ministre des DOM TOM, député, et actuel sénateur (PS). C’est donc un des hommes politiques majeurs de la Guadeloupe. En bref, un grand professionnel de la politique.
C’est d’ailleurs durant son mandat de président de région que l’état avait validé ce projet de construction. Il est donc au coeur de l’initiation de ce projet, et donc co-responsable de la situation actuelle, d’où sa posture clairement défensive….

Ainsi, selon un communiqué circulant sur les réseaux et qui lui est attribué, M. Victorin Lurel déclarerait :

Mes cher(e)s ami(e)s,

Je viens de lire , là où je suis , l’article précieux , savant et documenté d’un militant anonyme de l’UPR sur l’appel d’offres européen régissant la construction du nouveau CHU de la Gpe. Je le félicite pour cet éclairage pertinent .

Il postule que les Autorités nationales et locales , dans toute leur diversité, auraient menti au pays, qui par ignorance, qui par incompétence , qui par duplicité ! C’est son affaire ; il a parfaitement le droit de défendre cette thèse . Mais permettez moi de mettre l’accent sur un point qui me paraît une erreur majeure de son raisonnement et de sa ou ses conclusions : il ignore complètement le rapport de force politique , car cette affaire ne va pas se régler par des productions juridiques ou l’interprétation de textes ésotériques qui nous tiennent , avant comme après la publication de l’économie générale de l’AAPC et du règlement de la consultation . Nous aurions dû être ” véyatif” au moment de la conception et du travail fait par la maîtrise d’œuvre ;

La faute est commise et l’Etat n’a pas mis les acteurs locaux ds une  connivence de pensée et de conception.

Reste le rapport de force à posteriori imposé par les syndicats et les élus … imposant des déclarations des responsables de l’Etat et une charte pour traiter avec égalité les entreprise locales et l’emploi local. C’est la même chose que nous avions obtenu , en amont , du marché d’EDF relatif à la démolition de la centrale de Jarry , protocole qui a été allègrement violé et que nous avons su combattre victorieusement par la mobilisation de tous , nonobstant les textes qu’on nous opposait .

Ce n’est plus le droit qui décidera mais la lutte .

Par ailleurs , je demande à ce militant informé , quel texte européen impose de partitionner le marché en seulement 3 lots dont l’un qui , à lui seul , comporte 28 corps de métiers ? Qui a décidé de cela ? L’Europe ou la France ?

Rien ne l’imposait ! Qui a décidé d’inclure les VRD ds ce lot?  Il aurait pu parfaitement être autonomisé sans , pour autant , créer quelque discrimination ou autres inégalités de traitement !

Aujourd’hui , je reste persuadé ,qu’en droit , il est encore possible de revoir l’économie de ce marché, au risque de perdre quelques mois supplémentaires . C’est Élie Domota qui disait que ça fait 30 ans que dure l’urgence ! Un, 3 ou même 6 mois, prenons-en le pari !

Tous, nous savons les avantages et les inconvénients d’appartenir à l’UE. Chacun fait son bilan coût-avantage de cette appartenance .

Cette affaire est politique et c’est au PR et au gouvernement à faire respecter les engagements écrits et verbaux pris par devers nous .

C’est à Josette Borel -LIncertin d’abord et à Ary Chalus accompagnés de tous les élus et les socio-professionnels à imposer à l’Etat une décision appropriée conforme à nos vœux et , croyez moi , conforme au droit français et européen .

Qui veut peut.

Victorin Lurel

Par le présent communiqué, l’UPR souhaite réagir aux propos attribués à M. Lurel. Ce débat peut sembler pour beaucoup comme centré sur des questions de droit. Or, il est avant tout question de faits. Et la loi n’est qu’un fait parmi d’autres.

  • Monsieur Lurel reconnait la qualité de l’analyse d’un militant de l’UPR. Il est quand même sidérant qu’un simple militant politique ait été capable “d’éclairer” un homme politique de ce calibre! Bénévolement. Comment M. Lurel peut-il prétendre défendre les intérêts du peuple quand il reconnait lui-même ne pas être au courant des faits?
  • En tant que sénateur (et ex-député), M. Lurel est censé dire et faire le droit. Il est étonnant de le voir avouer lui-même qu’il ne connaît pas celui-ci, puisqu’il parle de textes “ésotériques”. S’ils sont ésotériques pour lui, que sont-ils pour les simples citoyens? De la cryptographie? Et encore, les textes que nous avons cités sont assez simples à comprendre. Nos juristes, nos spécialistes en droit européen et nos constitutionnalistes se feraient un plaisir de soumettre à M. Lurel d’autres textes bien plus pointus; mais de son propre aveu, il n’a pas le niveau suffisant.
  • Sur le fait queles Autorités nationales et locales, dans toute leur diversité, auraient menti au pays, qui par ignorance, qui par incompétence, qui par duplicité, M. Lurel prétend qu’il s’agit d’une “thèse”. Or, en quoi rapporter les faits relèverait de la théorie? Comme pour tout européiste (europathe devrait-on dire), le réel a les mêmes effets que l’eau sur les plumes d’un canard : aucun.
  • Dans le même ordre d’idée, prétendre que “La faute est commise et l’Etat n’a pas mis les acteurs locaux ds une  connivence de pensée et de conception.” montre que M. Lurel persiste à nier le réel. L’État, tenu depuis des décennies par des européistes, dont M. Lurel, n’a pas commis de faute en s’astreignant à respecter les directives européennes découlant des traités qu’il a signées en pleine conscience (1). La  note d’instruction ministérielle reçue par le préfet en est une parfaite illustration, et ce n’est ni un “texte ésotérique”, ni une “thèse”, c’est un fait. La faute réside dans le fait que le gouvernement soit européiste.
  • Dans notre article, nous avions souligné le fait que les personnalités politiques de l’île étaient, sur ce dossier, enclines à l’usage de slogans n’ayant aucune portée sur la réalité. M. Lurel ne fait pas exception à la règle en concluant ses propos par le slogan “qui veut peut“. Nous doutons que ce genre d’arguments soit opposable devant la CJUE…
  • Alors que l’UPR a clairement démontré que des grands élus de Guadeloupe ont failli à leur mission, ce que reconnait même l’un d’eux (M. Lurel), comment ceux-ci pourraient-ils prétendre défendre le dossier de la préférence à l’emploi local devant la CJUE, quand même des États s’y sont cassé les dents (2), et alors même que l’appel d’offres européen du nouveau CHU est déjà en cours? Il y aura de sérieux cours de rattrapage à prendre au préalable…
  • En prétendant désobéir au droit, M. Lurel fait du Mélenchon. Venant d’un élu, c’est cocasse, venant d’un ancien ministre, c’est inquiétant. Comment un sénateur de la République peut-il se permettre de dire “Ce n’est plus le droit qui décidera mais la lutte”? Qu’un syndicaliste tienne ce genre de propos est concevable et légitime mais, venant d’un sénateur, cela devrait relever de la justice.
  • Sur le commentaire “Tous, nous savons les avantages et les inconvénients d’appartenir à l’UE. Chacun fait son bilan coût-avantage de cette appartenance, nous aurions apprécié que M. Lurel précise quels sont concrètement ces avantages. Car, en l’espèce, il ne s’agit que de coûts pour les travailleurs et petits entrepreneurs guadeloupéens. Or,  c’est pour défendre ceux-là que des personnes sont censées être élues, pas pour autre chose.
  • Au final, M. Lurel parle quand même d’ “imposer à l’Etat une décision conforme au droit français et européen”, alors que l’UPR explique que l’appel d’offres européen dont il est question est justement conforme à ces droits, et que les personnes qui l’ont rédigé ont parfaitement fait leur travail en se conformant à ceux-ci. Chacun son métier. Et, comme l’a indiqué l’UPR, même si le fractionnement en de plus petit lots était possible, il n’était pas obligatoire, conformément à l’article 32 de l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015. Sous des contraintes budgétaires aussi drastiques, c’était probablement la seule voie possible. Mais ceci est un autre débat. (3)
  • M. Lurel et ses acolytes auront beau nier la réalité des faits, toute mesure directe ou indirecte ayant pour effet de favoriser l’emploi local sera, malheureusement, contraire au droit. Et donc, un grand groupe européen qui se sentira lésé par une telle discrimination sera en mesure, malheureusement, de poursuivre la France devant la CJUE. Et la France sera, malheureusement, condamnée. Et ce seront, malheureusement, les contribuables qui devront régler la note.

Tout ceci démontre l’embarras qui monte en Guadeloupe face aux réalités. Mais pas que dans le milieu politique. Le monde médiatique l’est probablement, étant lui aussi passé complétement à côté de la réalité. Pour preuve, cet extrait du journal local France-Antilles qui, dans son édition du 11/10/17, c’est à dire 6 jours après publication de l’appel d’offres européen, prétendait encore à son sujet :

Ainsi, faute d’avoir étudié la question, le journal s’est contenté de répéter les salades des élus.

L’UPR aimerait aussi connaitre la position des autres élus guadeloupéens sur ce dossier, à commencer par M. Ary Chalus, président du conseil régional de Guadeloupe qui, selon France-Antilles dans son édition du 25/10/17, avait annoncé :

Quelles suites lui a alors données M. Macron?

Si des personnalités d’un tel rang sont si sûres d’elles, elles ne devraient pas craindre un débat public avec M. François Asselineau, président de l’UPR.

En prônant la libre circulation de tout, y compris celle des travailleurs, l’Union européenne met les peuples européens en concurrence entre eux, au prix d’un effondrement social généralisé. En plus de semer la misère et tendre vers une nouvelle forme d’esclavage moderne, cette folie crée toutes les conditions pour attiser la haine entre les peuples.

“Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes.” (Bossuet)

Service de presse de l’UPR

(1)
L’UPR rappelle à ce propos que le traité de Lisbonne (signé en 2008 sous Sarkozy/Fillon avec la complicité de l’UMP, du PS, du MODEM et d’EELV) n’est rien d’autre que le traité constitutionnel européen qui avait pourtant été rejeté par les Français quand il leur avait été soumis par référendum en 2005 !

(2)
Quelques exemples de jugements de la CJCE :
http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:61992CJ0017&from=FR
http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?uri=CELEX:61988CJ0021&from=FR
http://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/HTML/?isOldUri=true&uri=CELEX:61989CJ0360

Mais aussi (source):
L’administration est tenue de ne pas appliquer et d’abroger les actes réglementaires contraires aux objectifs d’une directive (CE Ass., 3 février 1989, Compagnie Alitalia, n° 74 052)
Le Conseil d’État a jugé que la responsabilité de l’État est engagée lorsqu’une autorité administrative adopte un acte administratif contraire au droit de l’Union européenne (arrêts Société Arizona Tobacco products et SA Philip Morris France)

(3)
Comme l’a démontré de façon incontestable l’UPR, le démantèlement de nos services publics, notamment ceux de la santé, est la conséquence directe des GOPE imposées à la France par la commission européenne.