Nouvel ouragan monétaire en vue sur l’euro : Beppe Grillo prédit l’effondrement total de l’Italie sous 6 mois

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Le magazine hebdomadaire allemand Focus publie aujourd’hui un entretien avec Beppe Grillo, le dirigeant italien du “Mouvement Cinq Etoiles” (M5S), entretien qui a de fortes probabilités de mettre le feu aux poudres dès lundi sur les marchés des changes.

L’homme qui a réuni 25,5% des suffrages lors des élections législatives en Italie y déclare en effet que l’ensemble de l’Italie va s’effondrer dans les 6 mois, que les partis politiques italiens classiques vont être balayés devant l’impossibilité de payer les retraites et les salaires des fonctionnaires, qu’il faut donc renégocier la dette publique italienne en urgence, faute de quoi l’Italie devra sortir de l’euro et revenir à la lire. Dans les 6 mois, donc.

Voici la traduction du résumé de l’article en ligne sur le site de Focus :

Présentation de l'entretien avec Beppe Grillo sur le site de Focus http://www.focus.de/politik/ausland/italien-beppe-grillo-prophezeit-italien-den-totalen-zusammenbruch_aid_931112.html On notera que l'hebdomadaire allemand a choisi une photo particulièrement peu flatteuse pour illustrer cet entretien

Présentation de l’entretien avec Beppe Grillo sur le site de Focus http://www.focus.de/politik/ausland/italien-beppe-grillo-prophezeit-italien-den-totalen-zusammenbruch_aid_931112.html
On notera que l’hebdomadaire allemand a choisi une photo particulièrement peu flatteuse pour illustrer cet entretien

BEPPE GRILLO PRÉDIT L’EFFONDREMENT TOTAL DE L’ITALIE

Le vainqueur surprise de l’élection générale en Italie, Beppe Grillo, estime que le système politique de son pays va s’effondrer cette année. « Je donne encore 6 mois aux vieux partis – et puis ce sera fini ici », a déclaré le comédien de premier plan. « Ensuite, ils ne pourront plus payer les retraites et les salaires des fonctionnaires du service public. »

Le fondateur du “Mouvement Cinq Etoiles” (M5S) appelle à donc à renégocier la dette publique italienne : « Nous sommes écrasés non par l’euro, mais par la dette. Quand les intérêts atteignent 100 milliards d’euros par an, on est mort. Il n’y a pas d’alternative [à une renégociation de la dette] ». Beppe Grillon, 64 ans, compare les obligations de l’État aux actions d’une entreprise publique : « Si j’ai acheté des actions dans une entreprise qui fait faillite, alors j’ai de la malchance. J’ai pris un risque – et j’ai perdu. […] Si les conditions [de notre dette publique] ne sont pas modifiées, l’Italie devra sortir de l’euro et revenir à la lire.»

« Ce n’est pour l’instant que la répétition générale »

Beppe Grillo est disposé à former une coalition, soit avec le Parti Démocrate de gauche (PD) de Pier Luigi Bersani, soit avec le parti conservateur de droite de Sivio Berlusconi. Mais à plusieurs conditions :  « Si le Parti démocrate de (Pier Luigi) Bersani et le Peuple de la liberté (PDL) de Silvio Berlusconi proposent une modification immédiate de la loi électorale, reviennent sur le remboursement des dépenses électorales et fixent une limite de deux mandats pour les députés, nous soutiendrons naturellement un tel gouvernement, sans attendre. »

« Mais ils ne le feront pas. Ils bluffent pour seulement gagner du temps. »

Grillo est heureux que son parti n’ait pas fait un meilleur score à cette première élection. « Nous aurions pu être un peu inquiets si nous avions obtenu la majorité. Ce n’est pour l’instant que la répétition générale. »

Dans le corps de l’article, M. Grillo dit par ailleurs s’attendre à de nouvelles élections parlementaires dans les six mois qui viennent, élections qui seront remportées cette fois-ci, selon lui, par son Mouvement 5 Étoiles.


EN ROUTE VERS UN NOUVEL OURAGAN MONÉTAIRE

Comme on l’imagine sans peine, ces déclarations fracassantes de M. Beppe Grillo ne sont pas faites pour calmer le jeu après la situation sortie des urnes en Italie.

Désormais, il ne s’agit plus seulement d’une instabilité politique. Il s’agit de la perspective d’un “effondrement total de l’Italie” et d’une demande de renégociation de la dette publique italienne. Laquelle dette publique italienne est actuellement estimée, au 1er mars 2013, aux environs de 2030 milliards d’euros. C’est-à-dire près de 6 fois le montant de la dette publique grecque…

Autant dire que les spéculations sur l’avenir de l’euro vont repartir de plus belle !

Déjà, le député allemand CDU (parti de Mme Merkel) Klaus-Peter Willsch a appelé, hier 1er mars, à un retrait de l’Italie de l’euro.

Klaus-Peter Willsch, député allemand CDU, invite l'Italie à sortir de l'euro.

Klaus-Peter Willsch, député allemand CDU, invite l’Italie à sortir de l’euro.

Dans les colonnes du journal Handelsblatt, ce membre du Bundestag explique en effet : « Si un pays n’arrive pas à convaincre une majorité de sa population de respecter les engagements qu’il a pris lui-même pour que la monnaie commune fonctionne, on ne peut pas lui demander depuis l’extérieur de revoter, mais on doit le laisser revenir à sa monnaie nationale. »

Et il précise : « Si nous voulons revenir à une coexistence pacifique et respectueuse en Europe et prendre l’auto-détermination des peuples au sérieux, nous devons renoncer à l’idéologie euro-européenne. Une union monétaire ne peut survivre que si elle profite à l’ensemble de ses membres.»

Source : http://www.handelsblatt.com/politik/deutschland/wegen-unsicherer-lage-cdu-haushaelter-empfiehlt-italien-lira-rueckkehr/7858022.html

Bien entendu, ces conseils de bon sens sont officiellement désapprouvés par les dirigeants européistes allemands.

Lors d’une rencontre à Berlin avec le président italien Giorgio Napolitano, avant-hier jeudi 28 février, la Chancelière Angela Merkel a ainsi « exprimé sa confiance dans le sens des responsabilités des forces politiques en Italie », selon le communiqué officiel diffusé après la rencontre des deux dirigeants.

Dans le même numéro de Focus que celui où M. Grillo a été interrogé, le ministre allemand de l’Économie et vice-chancelier, M. Philipp Rösler, en rajoute une louche en appelant, lui aussi, l’Italie à poursuivre sur la voie engagée par le dernier chef de gouvernement Mario Monti.

Reste que, derrière toutes ces hypocrisies, nul n’ignore que le fameux Mario Monti a subi une déroute électorale avec le score – ô combien humiliant pour un chef de gouvernement sortant ! – 10% des suffrages.   Le pessimisme a d’ailleurs tellement gagné la BCE elle-même que, d’après les rumeurs insistantes qui me sont parvenues, de plus en plus de salariés de la BCE chercheraient à quitter Francfort pour se recaser dans d’autres institutions, tandis qu’un plan de licenciement collectif serait actuellement sérieusement à l’étude.

Au passage, qu’il soit permis de souligner ici à quel point les événements se chargent d’eux-mêmes de ridiculiser l’actuel occupant de l’Élysée, qui avait cru bon d’affirmer devant micros et caméras – le 10 décembre dernier à Oslo – que « la crise de la zone euro est derrière nous » !

Journal Libération du 10 décembre 2012 Devant une telle déclaration, toute personne sensée ne peut que s'interroger sur la personnalité de M. Hollande : s'agit-il d'incompétence crasse, de volonté de manipuler l'opinion publique, ou de pure sottise ? Des trois à la fois sans doute.

Journal Libération du 10 décembre 2012
Devant une telle déclaration, toute personne sensée ne peut que s’interroger sur la personnalité de M. Hollande : s’agit-il d’incompétence crasse, de volonté de manipuler l’opinion publique, ou de pure sottise ? Des trois à la fois sans doute.

CONCLUSION : LA MISE EN GARDE DE LA CHINE

Le président Barack Obama a signé hier, vendredi 1er mars, le décret mettant en vigueur les coupes automatiques dans le budget de l’État fédéral américain après l’échec d’une ultime réunion avec les chefs des groupes parlementaires. Les dépenses publiques américaines seront donc amputées de 85 milliards de dollars.

Il devrait en résulter rapidement un ralentissement de l’économie américaine, et donc de la croissance du commerce mondial. Ce qui laisse augurer d’une lutte encore plus âpre pour la préservation des positions commerciales des grandes puissances commerciales, qui a toutes chances de se traduire par une nouvelle “guerre des monnaies” sur les marchés des changes.

La Chine, qui est évidemment l’un des pays les plus concernés par ces évolutions, vient donc, ce 2 mars, de mettre les points sur les “i”, par la bouche de M.YI Gang, vice-gouverneur de la Banque Centrale de Chine.

Après avoir affirmé qu’une guerre des monnaies pourrait être évitée si les décideurs des grands pays observaient le consensus atteint lors du récent G20, selon lequel les politiques monétaires devaient avant tout servir d’instrument aux économies nationales (et non à favoriser les exportations), M. YI Gang a indiqué que la Chine est « tout-à-fait prête à une guerre des monnaies ».

Et M. YI a même précisé : « En termes à la fois de politique monétaire et autres mécanismes, la Chine prendra complètement en compte les politiques d’assouplissement quantitatif mises en place par les banques centrales des pays étrangers. »

2 mars 2013 : l'agence de presse chinoise Xinhua vient de mettre les points sur les "i", en citant M. YI Gang : « la Chine est tout-à-fait prête à une guerre des monnaies ».

2 mars 2013 : l’agence de presse chinoise Xinhua vient de mettre les points sur les “i”, en citant M. YI Gang : « la Chine est tout-à-fait prête à une guerre des monnaies ».

Source.

En clair : la Chine ne laissera pas sans réagir les Américains ou les Japonais laisser baisser le dollar ou le yen sur les marchés des changes, dans le but de favoriser leurs exportations. Dans un tel cas, la Chine s’appliquera à faire baisser le yuan chinois à due proportion.

Et dans ce cas, il est simple de deviner qui sera, encore une fois, le dindon de la farce : l’euro bien sûr puisque c’est la seule monnaie mondiale qui n’ait aucun objectif de taux de change externe. (Je rappelle que l’article 282 du TFUE ne fixe à la BCE comme objectif que la lutte contre l’inflation et il est d’ailleurs impossible de fixer un taux de change externe qui convienne aux différentes compétitivités des différentes économies de la zone euro).

Conséquences à attendre ?

  • 1°) En ce mois de mars 2013, tous les éléments se mettent donc en place pour annoncer un nouvel ouragan monétaire.
  • 2°) Dirigée par une équipe gouvernementale profondément incompétente et esclave des décisions prises par l’oligarchie financière euro-atlantiste, la France ne peut que continuer à s’enfoncer dans le désastre.

François ASSELINEAU